La qualité de l’éducation, dans tous les pays, est dépendante de la pertinence d’un certain nombre de choix. D’abord il convient de définir les savoirs et compétences visés qui ouvrent la voie de l’émancipation de tous et toutes. Ensuite travailler la façon de les présenter pour qu’ils instruisent
vraiment, c’est à dire réfléchir à la façon de mettre ces savoirs au service du bien public. Enfin, prendre des décisions sans lesquelles le travail précédent serait vain, pour que les moyens engagés pour l’École garantissent des structures et des conditions d’études optimales.
Pour l’heure, le conseil supérieur des programmes, suivant la feuille de route rédigée par V. Peillon, va bientôt proposer, après le socle commun, de nouveaux programmes scolaires. De nouvelles possibilités semblent donc s’ouvrir, à la hauteur, espérons-le, des besoins de formation des futur-es citoyen-nes et des défis que la jeunesse française va devoir affronter. L’École, dans son état actuel, ne permet pas de réduire les inégalités et peut même contribuer à les creuser. Notre discipline n’est pas en dehors de ces questions sociétales et notre profession doit s’engager pleinement dans une réflexion et dans une réelle dynamique de construction de nouveaux programmes pour la réussite de tous et toutes. Car, c’est maintenant un constat partagé en EPS, les programmes actuels sont en décalage trop important avec les réalités de l’enseignement au quotidien et n’aident pas pour une augmentation massive et significative du niveau culturel des élèves.
Car, c’est maintenant un constat partagé en EPS, les programmes actuels sont en décalage trop important avec les réalités de l’enseignement au quotidien et n’aident pas pour une augmentation massive et significative du niveau culturel des élèves.
Les regroupements d’activités dans des compétences dites « propres » ne renvoient pas à la diversité des expériences à vivre dans notre champ culturel, elles tendent au contraire à en réduire la richesse et à créer des ambiguïtés sur le sens des apprentissages ; les niveaux dans les compétences attendues sont soit formels soit mal identifiés, et ne correspondent pas aux horaires indicatifs fixé, etc.
Les propositions qui suivent, pour l’EPS, sont autant de conditions à réunir pour créer un nouvel élan disciplinaire.
- L’EPS est définie comme la discipline « d’étude des APSA » et vise ainsi l’appropriation d’une véritable culture physique sportive et artistique moderne 1 et la formation d’un-e citoyen-ne émancipé-e.
- Si la réflexion sur les programmes scolaires doit s’inscrire dans un véritable débat de société, si le travail doit pouvoir être mené par un organisme indépendant, comme c’est le cas aujourd’hui avec le CSP, les enseignant-es et leurs organisations représentatives doivent être partie prenante des décisions qu’ils devront in fine mettre en œuvre.
- Les programmes doivent être évalués régulièrement. Cette évaluation est confiée à une organisation paritaire, académique ou départementale, qui doit réaliser un bilan partagé à partir d’observations et d’entretiens sur les acquisitions réelles des élèves. Les modifications ou corrections éventuelles seront proposées, sur la base de ces bilans, par le CSP.
- L’étude des APSA doit déboucher sur des acquisitions significatives et indissociables : enrichissement des « pouvoirs d’agir », développement des capacités d’analyse de ses propres apprentissages et de réflexion sur les APSA en tant que pratiques sociales, construction de l’altérité dans le cadre de règles collectivement élaborées. Chaque objet d’étude défini doit s’accompagner des méthodes de travail inhérentes à l’objet, des expériences sportives, artistiques, humaines qui sont liées.
- Les acquisitions dans chaque APSA doivent être accompagnées de repères en termes de durée d’apprentissage et de conditions de travail (équipements sportifs). Elles matérialisent la contribution originale de l’EPS aux 5 domaines du nouveau socle et offre dans le même temps des thèmes de travail interdisciplinaire.
- Les compétences attendues se concrétisent dans des performances scolaires de fin de cycle permettant d’évaluer l’atteinte ou non de la compétence. C’est en se confrontant à des épreuves sportives et artistiques et à un réajustement permanent de leurs potentialités que les élèves s’engagent dans un projet concret de transformation de soi. C’est l’une des contributions de l’EPS à la formation d’un-e citoyen-ne. L’égalité entre les filles et les garçons doit être réelle et faire l’objet d’une réflexion nouvelle, en lien avec la recherche.
- L’équipe enseignante est conceptrice de la programmation équilibrée des APSA, de la progressivité des apprentissages, et donc d’une réelle mise en œuvre d’une approche curriculaire dans le cadre des prescriptions nationales que sont les programmes et qui définissent la culture commune visée.
- Les programmes et programmations sont conçus pour permettre à tous et toutes une ouverture culturelle suffisante grâce à l’enseignement dans 9 groupes d’APSA et à approfondir ses apprentissages dans une ou deux APSA, afin de leur garantir un niveau satisfaisant, source de plaisir et d’estime de soi.
- Les programmes doivent être accompagnés d’un ou plusieurs programmes de recherche dans le cadre universitaire, en lien avec les ESPE et les UFRSTAPS, et d’un plan de développement de la formation continue « en présentiel ». La formation initiale, quant à elle, doit former des enseignant-es cultivé-es et critiques, dans un rapport constructif aux programmes qui ne sont pas des objets « à appliquer ».
- Il faut distinguer la publication des programmes pour le public, qui doit être « lisible », et la publication pour les enseignant-es, qui doit rendre compte des enjeux didactiques et pédagogiques des savoirs étudiés.
- Il y a consensus actuellement pour définir trois champs de culture : le champ sportif qui continue de s’étendre par des pratiques non institutionnalisées, le champ artistique composé principalement pour les pratiques physiques par la danse et les arts du cirque, et un troisième champ qui regroupe des activités dont la seule caractéristique commune est de n’être ni sportives, ni artistiques : le yoga, la musculation, la relaxation, le stretching, les gymnastiques « douces », etc.[↩]