Il est parfois difficile d’articuler son mode de pratiques avec ses valeurs. Les pratiquant.es des activités de montagne de la FSGT qui organisent un rassemblement autogéré ont fait le choix de venir en aide aux citoyen.nes qui aident les migrant-es dans la montagne et qui sont considérés comme hors-la-loi. Rencontre avec l’une d’entre elle, engagée dans les maraudes solidaires dans la montagne.
Annette Huraux travaille à la CIMADE, association qui défend les droits des étrangers. Elle pratique également l’escalade à l’association FSGT « le mur » à Paris car elle se reconnaît dans les valeurs portées par cette fédération : « L’accès au plus grand nombre, la façon dont on forme les pratiquants en les accompagnant pour devenir autonomes, un fonctionnement horizontal sans rapport au pouvoir entre ceux qui savent et ceux qui ne savent pas. »
Elle participe au rassemblement FSGT omnisport et autogéré de Freissinières (Hautes-Alpes) qui vise le partage des connaissances et compétences des pratiquant.es d’activités de plein air : fonctionnement collaboratif pour l’organisation, gestion de la vie collective et des activités partagées (escalade, alpinisme, canyon, via ferrata, randonnée, etc.). Annette précise « La FSGT a réservé une partie d’un camping. Une grande tente permet quelques activités collectives. Un grand tableau blanc avec plusieurs calendriers concernant l’escalade en grande voie, en voie simple, via Ferrata, canyoning. Chacun peut proposer des activités ou s’inscrire pour participer aux activités proposées par les autres. »
Elle ajoute : « Les pratiquants se rencontrent et discutent en amont. Nous réalisons l’activité dans la confiance. Nous prenons le temps de vérifier la faisabilité – parfois même avec une sortie préalable -si l’activité engage une grande prise de risque ».
Ils ont commencé par humanité et esprit de montagne à les aider
Cette année le nombre de personnes qui traversent la mer méditerranée a encore augmenté. Des familles, des jeunes et des enfants qui cherchaient à traverser la mer dans l’espoir de fuir la guerre, la pauvreté, de trouver une vie meilleure. Une fois le territoire européen atteint, d’autres épreuves les attendent, notamment pour traverser la frontière de l’Italie vers la France. Des citoyens, des montagnards, des sportifs ont apporté de l’aide à ces hommes et ces femmes, en leur indiquant le chemin, en laissant de la nourriture ou des habits dans les refuges.
Lors du rassemblement hivernal FSGT, plusieurs sportifs.ves se sont retrouvé.es face à des personnes qui descendaient du col de l’Echelle. Cela été un réflexe de montagnard de leur venir en aide, malgré une surveillance accrue de la police. Ils/elles ont participé aux maraudes organisées par les habitant.es de la région pour leur indiquer leur chemin, leur donner des vivres.
« Cela s’inscrit dans nos valeurs et notre engagement sportif » nous dit Annette. « Nous sommes attentifs les unes aux autres, et nous nous sommes rapprochés de ces différents réseaux citoyens et réseaux. »
« Beaucoup de personnes qui sont criminalisées, poursuivies par la justice française, pour avoir aidé à franchir la frontière ou arrêtées pour avoir aidées des migrants. Nous nous sommes posé la question : allait-on juste grimper dans les Alpes l’été ou allait-on faire quelque chose ? Nous avons décidé de mener des actions de solidarité et d’organiser des soirées de soutien. »
L’école, tout comme les clubs sportifs, doit accueillir tous les enfants de ces migrations et avoir les moyens de le faire
Ces propos résonnent avec ceux du congrès du SNEP-FSU en 2017 qui affirmait : « l’impérieuse nécessité de pouvoir accueillir les migrant.es dans des conditions dignes. Le SNEP considère que ce devoir de solidarité doit s’imposer équitablement à tous les pays de l’Union. L’école, tout comme les clubs sportifs, doit accueillir tous les enfants de ces migrations et avoir les moyens de le faire. » en écho à l’activité de nombre de militants.es du SNEP dans des collectifs d’accueil de migrants.
« On n’est pas d’accord avec la criminalisation de l’aide aux migrants, ni que l’Etat agisse en notre nom de cette façon. Il y a eu un grand rassemble à Montgenèvre, avec plusieurs associations locales et nationales, dont la FSU, pour rendre public ce qui se passe dans ces lieux. On veut être solidaire avec les personnes qui soutiennent les migrants et organisent des maraudes. »
Annette conclut en nous disant :
« Si la loi n’autorise pas à venir en aide à une personne, il faut donc changer la loi. Cela dépend de notre propre capacité de résistance. Il est important de savoir et de connaître les risques auxquels on s’expose, et d’y réagir, d’un point de vue éthique et politique. Je suis très contente que la Fsgt soit engagée du côté des personnes et du respect de la vie humaine. »
Pour en savoir plus :
La vidéo de la grande maraude solidaire du 15/03/2019
Le Petit guide sur le délit de solidarité, sorti le 06/07/2019