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Repenser l’entraînement et l’évaluation sportive des filles et des garçons : l’analyse d’Aurélien Broussal-Derval

Aurélien Broussal-Derval, spécialiste de la préparation physique et auteur de plusieurs ouvrages dont L’Art du Mouvement, s’est exprimé récemment sur la question des différences entre filles et garçons dans le cadre de l’entraînement et de l’évaluation en éducation physique et sportive (EPS). Il propose un regard critique sur la manière dont les barèmes et méthodologies d’entraînement sont appliqués et questionne leur pertinence à l’aune des connaissances scientifiques actuelles. Pour prolonger à découvrir sur sa chaine youtube : https://www.youtube.com/channel/UC7cXH9PLIOTCbLpyAHvHYxQ

Des différences physiologiques avérées mais souvent mal exploitées

Lorsqu’on aborde la question des différences entre les sexes dans le domaine sportif, il est essentiel de nuancer le propos. Broussal-Derval rappelle que des disparités existent bel et bien en termes de capacités physiologiques. Par exemple, les femmes possèdent en général une proportion plus élevée de fibres musculaires lentes, ce qui leur confère une meilleure récupération aérobie et une plus grande capacité à réitérer des efforts intenses avec moins de temps de récupération. À l’inverse, les hommes bénéficient souvent d’une masse musculaire plus importante, ce qui leur confère un avantage sur les efforts de force maximale.

Cependant, ces différences ne justifient pas nécessairement les écarts de barèmes imposés dans certaines disciplines.

La question des barèmes en EPS : un enfermement dans une logique binaire ?

Dans l’enseignement de l’EPS, l’usage de barèmes différenciés entre filles et garçons pose question. Ils sont censés tenir compte des disparités physiologiques, mais, selon Broussal-Derval, ils enferment surtout les éducateurs et les élèves dans une vision binaire et parfois obsolète de la performance.

Il dénonce notamment l’attribution systématique de charges moindres aux filles dans les disciplines de force et de vitesse maximale. En réalité, en tenant compte du poids de corps et d’autres paramètres individuels, les écarts de performances sont souvent bien moindres que ce que laissent entendre les barèmes traditionnels. « Il n’y a pas de faibles femmes », insiste-t-il, expliquant que les jeunes filles sont parfaitement capables de supporter des charges élevées si elles sont adaptées à leurs capacités relatives.

À l’inverse, dans les sports d’endurance, les protocoles d’entraînement ne tiennent pas toujours compte des capacités de récupération plus rapides des femmes. Elles se voient parfois accorder des temps de repos similaires, voire supérieurs à ceux des hommes, alors que leur métabolisme leur permettrait d’enchaîner les efforts plus rapidement et plus efficacement.

Revoir les méthodes d’entrainement

L’auteur propose une remise en question des méthodes d’entraînement. Selon lui, il conviendrait de sortir d’une lecture strictement comparative entre les sexes et de privilégier une approche plus individualisée. L’objectif ne devrait pas être d’ajuster artificiellement les performances en fonction du sexe, mais plutôt de tirer parti des particularités physiologiques pour optimiser les progrès de chacun.

Il évoque notamment l’intérêt croissant pour les méthodes de travail inspirées du cross-training, une discipline où la mixité est courante et où l’adaptabilité des charges et des exercices permet à chacun de progresser selon ses propres capacités. Il souligne que cette approche séduit particulièrement les jeunes filles, car elle leur permet de mobiliser leurs capacités spécifiques de manière efficace et valorisante.

En somme, l’enjeu est de moins se focaliser sur une comparaison rigide mais de l’articuler pour se concentrer sur le développement optimal de chaque individu, quel que soit son sexe. Cela passe par une adaptation plus fine des contenus pédagogiques et des protocoles d’entraînement. Une perspective qui invite les enseignants d’EPS et les préparateurs physiques à repenser leurs pratiques.