La structure du lycée
La réforme du lycée, après la baisse des horaires par élève (2h30 en moyenne), se poursuit dans une logique comptable en limitant le nombre d’options et le nombre d’élèves qui pourront accéder à l’université. La France a pourtant les moyens de garantir à sa jeunesse la possibilité de continuer des études. Ce serait par ailleurs « rentable » puisque contrairement à ce que le gouvernement ne cesse de répéter pour justifier sa réforme, les jeunes qui accèdent à l‘université trouvent plus facilement du travail.
Le ministère a affiché sa la volonté de supprimer les filières, pour soi-disant « démocratiser ». Or la mise en place de spécialités est plus opaque et plus ségrégative. Il est assez facile de faire les tests en ligne de l’Onisep pour voir par exemple qu’il vaut mieux de prendre les options scientifiques pour s’ouvrir le plus de possibilités dans la continuité de ses études. S’ensuit un engorgement de ces spécialités auxquelles tout le monde n’aura pas accès, non par choix mais par limitation de places, quand d’autres péricliteront. Qui va pâtir de cette réforme? Les élèves les plus fragiles, statistiquement plus nombreux à être issus des milieux défavorisés. Démocratisation, vraiment ?
La place de l’EPS
L’EPS se retrouve affaiblie à la fois dans le cursus et dans sa place aux examens. Structurellement, la réforme se solde par l’utilisation massive du mercredi après midi pour « optimiser » les emplois du temps rendus encore plus complexes par le système des spécialités (que les chefs d’établissement disent eux-mêmes impossible à gérer), ce qui va affaiblir encore le sport scolaire. Il est probable également que l’EPS va être aussi impactée notamment dans ses possibilités d’alignements de classes. Par ailleurs c’est la seule discipline à ne pas participer aux enseignements de spécialités, selon la volonté explicite du ministère (sans aucun argument sérieux). Les options facultatives sont marginalisées. Les élèves ne pourront prendre qu’une seule option qui ne comptera que pour 0,66% du total des coefficients. De plus, le programme de l’enseignement facultatif EPS est infaisable et met déjà enseignant-es et élèves en porte-à-faux.
Sur l’enseignement de spécialité, la mobilisation du SNEP-FSU et des établissements concernés par la disparition de l’ancienne option dite de complément en EPS, a conduit le ministre a accepter de tenter une expérimentation (dans une dizaine d’établissements en France) qui permettra à terme peut-être de créer cet enseignement que nous demandons depuis le début de la réforme.
Programme EPS
Le ministère s’entête dans sa volonté de faire des champs d’apprentissage (anciennement compétences propres) l’alpha et l’oméga de l’EPS. Cette vision abstraite de l’EPS, consistant à faire croire que la natation et l’athlétisme peuvent viser un même « attendu », comme le rugby et le tennis de table, le volley ou à la boxe, la danse et de la gym est une véritable provocation à notre professionnalité, ainsi qu’à la possibilité pour les familles de comprendre l’EPS. Ce ministère, préoccupé uniquement par une volonté d’affichage simpliste (vous comprenez, il y a trop d’APSA…), n’a aucune ambition pour les apprentissages des élèves.
L’EPS est pilotée par de grandes
finalités sans qu’on se préoccupe des contenus spécifiques permettant de les
atteindre, comme si en maths, faire des élèves des individus autonomes
conduisait à supprimer toute référence à la géométrie…
Référentiels BAC
Le Bac EPS, dans sa proposition actuelle, poursuit ce mouvement d’abandon de ses repères en renonçant aux référentiels nationaux par APSA. Ceux-ci devaient être modifiés, retravaillés, réévalués par un travail collectif incluant la profession et ses représentants, c’est ce que nous demandions, mais leur suppression renvoie l’EPS à ce qu’elle était avant les années 90 : une discipline en marge du système. C’est renoncer à ce qui a permis depuis de conforter la place de l’EPS dans l’Ecole : des contenus spécifiques, des référentiels nationaux aux examens… Malgré les critiques et arguments avancés suite à la publication récente de son rapport le SNEP rejoint la Cour des Comptes lorsqu’elle affirme la nécessité de repères nationaux précis pour évaluer l’efficacité d’une discipline.
Or, après l’arrêté modifié sur le CCF ( BO n°31 du 29/08/19) la circulaire sur l’organisation du contrôle en cours de formation (CCF) et référentiel national d’évaluation vient d’être publiée (BO n°36 du 3/10/2019), son contenu est inepte, son contenu discrédite la discipline dans ses fondements.
En effet, ce texte ose :
- Des repères d’évaluation généraux par champ d’apprentissage, donc abscons quand on les décline par APSA (bien sûr, nager et courir c’est la même chose!)
- Une répartition des points qui réduit ceux de l’épreuve physique (12/20, la «motricité» va bientôt devenir un vieux souvenir…).
- – Une attribution de points (8/20) en contrôle continu alors qu’il s’agit ici du contrôle en cours de formation.
- -Des points au choix de l’élève.. etc.
ils ont osé, alors osons. Le SNEP-FSU appelle la profession à se mobiliser pour que cette circulaire ne s’applique pas à la rentrée prochaine. D’abord en répondant à l’enquête en ligne sur le site du SNEP. Ensuite le SNEP invite la profession à procéder à un examen critique des référentiels existants (ceux du BO n°25 du 21 juin 2018) ) pour les faire évoluer. Le SNEP se chargera prochainement de recueillir le travail et proposer de nouveaux programmes et référentiels alternatifs qui puissent servir de normes nationales dès la rentrée prochaine.
Nous avons un an avant le premier Bac nouvelle formule, le ministère a le temps de réviser sa position.
Une EPS affaiblie
Cette politique du ministérielle va affaiblir l’EPS dans le système scolaire. Une discipline qui perd sa pertinence, ses contenus spécifiques, ses critères d’évaluation aux examens, perd aussi son statut de discipline au profit d’une « activité » scolaire, un « temps » scolaire. Dès lors toutes les attaques qu’elle pourra subir au plan structurel seront facilitées. La profession se retrouve en quelques mois à peine dans la situation dans laquelle elle se trouvait au début des années 80, avec la nécessité de consolider sa place dans le système. Il ne s’agit donc en aucun cas d’une réforme « pédagogique », encore moins de revalorisation du rôle des enseignants (avec l’accent mis sur la «liberté pédagogique»: c’est un argument de vente de la réforme qui ne trompe personne). C’est simplement une entreprise de fragilisation qu’il faut combattre : alors que tout nous montre qu’il faut construire du commun, du partagé, on nous pousse au morcellement et à l’individualisation.