Cet état des lieux sur 2S2C à l’école primaire a été élaboré suite à 2 visio-réunions auxquelles 60 CPD EPS ont participé à l’initiative du SNEP-FSU. Bilan : Il est impératif que 2S2C soit un dispositif transitoire !
Le 2S2C : transitoire ou « l’avenir de l’Ecole » ?
Fin avril, un groupe de députés LERM propose à Blanquer d’expérimenter un « modèle à l’allemande » qui aurait le triple avantage « de sortir du confinement de manière innovante, de renforcer la place du sport à l’école et soutenir financièrement les clubs dont les recettes ont chuté du ait de la crise sanitaire ». Une semaine plus tard, Blanquer annonce le dispositif 2S2C avec un protocole réglementaire qui consiste à proposer des interventions de type périscolaires au sein de l’école, et qui ont vocation à être transitoire. Suite à des réactions syndicales et professionnelles, notamment celle du SNEP-FSU qui a l’habitude de
ce type de dispositif « cheval de Troie » qui tentent de fragiliser l’EPS, et peut-être aussi à des débats au sein même de l’Education nationale (cf. la tribune de hauts-fonctionnaires sur les méthodes Blanquer) une seconde version du protocole affirme que 2S2C ne se confond pas avec l’EPS et ne s’y substitue pas. Le dispositif est toujours annoncé comme transitoire. Le 25 mai, devant les sénateurs, Blanquer affirme «On a été un peu précipité, mais 2S2C était déjà en préparation. Il est l’avenir de l’école ». Si cela ne nous rassure pas, cela a au moins le mérite d’être clair ! Cependant, sur le terrain, ce n’est pas simple.
Comment réagissent les DASEN ?
On peut identifier 3 types de réactions :
- Des DASEN qui, confrontés à l’urgence, prennent le dispositif au pied de la lettre : transitoire, avec une réglementation exceptionnelle : il s’agit de périscolaire au sein de l’Ecole pour accueillir les enfants, organisé en lien avec les collectivités territoriales, des qualifications minimales, le tout avec une rémunération minimale (type accueil ACEM)
- Des DASEN qui tentent de renforcer le protocole et d’appliquer la réglementation habituelle (qualifications, choix d’APSA, mini-projets pédagogiques). Intention louable, mais tout aussi dangereuse vu que la réglementation provisoire reste « hors la loi » puisque les intervenants peuvent intervenir seuls, en responsabilité des élèves sans la présence du PE ! Qui est responsable en cas d’accident ? La question est pour le moment sans réponse…
- Des Dasen « petits soldats » ou sous pression » qui répondent à l’unique commande du ministre qui souhaite « faire du chiffre » pour pouvoir communiquer que la reprise de l’école a été bonne en annonçant le plus grand nombre possible de conventions 2S2C signées. Ainsi, 200 conventions ont été annoncées puis 2000 la semaine suivante.
Ces positionnements des DASEN impactent fortement les CPD dont le rôle est de mettre en œuvre la politique décidée. leur rôle CPD varie selon les départements :
- Le CPD EPS est pilote du GAD ou très impliqué.
- Le (ou les) CPD EPS est juste informé et responsable du fichier relatif à l’honorabilité des intervenants.
- Le CPD EPS n’est pas sollicité. Dans ce cas, tout est géré entre le DASEN (ou un IENA) et les collectivités territoriales, avec l’appui des personnels Jeunesse et Sports (récemment intégrés à l’EN rappelons le)
Tous les CPD sont conscients du danger du 2S2C pour l’EPS en tant que discipline scolaire.
Ce qui ressort du débat :
- Tous les CPD sont conscients du danger du 2S2C pour l’EPS en tant que discipline scolaire. Il arrive dans une période où l’accent mis sur les maths et le français fragilise énormément le système EPS avec la quasi-disparition des CPC EPS, et la négation de leur rôle sur le développement de l’EPS. La formation continue en EPS a quasiment disparue et la faible formation initiale produit des jeunes enseignants en difficulté pour enseigner l’EPS.
- La priorité est de se battre pour que le dispositif reste transitoire. Dans le cas contraire, ce serait dramatique non seulement pour l’EPS pour toute l’Ecole. On aurait une Ecole « à mi-temps », centrée sur maths et français, qui ne répondrait à aucun des enjeux d’accès à la culture et de réduction des inégalités. A terme, la porte ouverte aux écoles privées qui seraient plus ambitieuses que l’école publique en termes de contenus et d’apprentissages.
- Informer que le dispositif 2S2C , s’il avait vocation à devenir pérenne, est « hors la loi » dans le sens où il contourne le code de l’Education, voire le code du sport. La loi dit que l’enseignant est responsable de ses élèves et de ses enseignements. Qui est responsable lorsque des élèves font de la voile encadrés par un intervenant seul, pendant que l’enseignant-e s’occupe des autres élèves ? Qui est responsable lorsqu’un animateur périscolaire propose une activité sportive au sein de l’école, qui – en principe – nécessite un diplôme spécifique quand elle est dispensée contre rémunération?
- Dénoncer tous les abus et les dérives qui dégradent très fortement le service public d’éducation.
Informer et solliciter tous les défenseurs d’une l’Ecole ambitieuse pour tous:
En premier lieu, informer et alerter sur la réalité du dispositif et ses dérives possibles au sein même de l’Education Nationale. La majorité des IEN et des PE sont attachés au service public d’éducation et ne voudront pas d’une école qui se contente de déléguer une grand part de ses enseignements à des animateurs. Ce dispositif doit donc rester transitoire !
- Prendre contact avec le SNUipp et le SNEP du département 1, informer les collègues de la situation réelle du 2S2C et des conséquences sur l’Ecole en général et l’EPS en particulier.
- Revendiquer avec les PE « plus de maîtres que de classes » et non pas plus d’animateurs pour alléger le travail des PE au détriment des élèves. Débattre des formations à dominante EPS et de l’opportunité d’un.e enseignante -ressource EPS dans chaque école
- Dénoncer le double langage de Blanquer qui fait semblant de s’intéresser au sport à l’école, alors que depuis qu’il est ministre, il casse la formation des PE, supprime de fait les CPC EPS
- Reprendre les débats sur le rôle irremplaçable de l’EPS au sein de l’Ecole à la fois pour se développer corporellement, apprendre ensemble, accéder à la culture et réduire les inégalités sociales, sexuées et territoriales. Revendiquer en premier lieu de la formation et la non- suppression des CPC EPS.
- Alerter les parents d’élèves, les collectivités territoriales, le mouvement sportif. Un affaiblissement du service public d’éducation ne se traduira par aucun progrès, ni du côté du périscolaire, ni du côté du mouvement sportif. En ce sens, il faut être attentif au fait de ne pas opposer EPS et Sport (débat totalement inaudible en dehors des spécialistes 2, mais insister sur le rôle spécifique de l’école et les enjeux de société. Si nous souhaitons que tous les enfants aient leur compte d’activité physique (recommandations OMS : 1h par jour) et accèdent à une pratique sportive réfléchie, alors on a besoin des 3h d’EPS obligatoire, mais aussi du sport scolaire (USEP), mais aussi du périscolaire et des clubs. Et l’Etat doit investir dans ces 3 champs alors que 2S2C est tout le contraire, un dispositif low-cost pour tous !
A la rentrée, les CPD mèneront une campagne sur le thème « Avec l’EPS, donnons du corps à l’école » vers les enseignant.es, les partenaires, les institutions, le grand public (cf. projet SNEP-SNUipp-SNPI (FSU) en construction pour montrer que si le ministre le voulait vraiment, il dynamiserait facilement l’EPS dans le primaire au lieu de l’externaliser).
- Voir communiqué commun SNEP-SNUipp du 18 mai 2020 De l’EPS à l’école pour tous et toutes (et non le 2S2C) [↩]
- La différence entre EPS et Sport, ce n’est pas la bonne question [↩]