En lisant le site d’Éduscol, site ministériel, nous sommes tombés sur un document qui donne des indications sur les contenus de l’EPS pour la période post-confinement, en ajustant les programmes actuels. Les enseignants d’EPS pourraient se saisir des préconisations publiées dans le préambule car elles constituent une réelle opportunité
pour notre discipline : faire la démonstration de son importance dans les curriculums, de l’intérêt des savoirs qu’elle permet d’acquérir dans les APSA et de sa nécessité dans la vie des jeunes. En somme, nous pourrions insister sur l’indispensable revalorisation de sa place à l’École et notamment au brevet des collèges.
L’imaginaire au pouvoir !
En effet, le ministère invite « Chaque équipe de collège à définir ses propres priorités pour une EPS extra-ordinaire ». Il ajoute : « Un projet EPS de fin d’année qui s’appuiera sur les apprentissages corporels qui avaient été travaillés avant le confinement. »
Il poursuit en indiquant : « On peut penser que ce qui a le plus manqué aux élèves durant cette période de confinement est la pratique réelle, une pratique partagée, encadrée, accompagnée et ludique. ». Il ajoute même : « une pratique réelle, partagée, ludique sur les espaces extérieurs, une EPS extraordinaire. »
Les enseignants d’EPS sont connus pour leur inventivité et leur capacité de résistance et d’adaptation. Éduscol, site du ministère, nous incite ici à exprimer nos options et le sens de la discipline que nous défendons.
Nous ne pouvons que dire : Chiche !
La définition des contenus en EPS : une question tant politique qu’institutionnelle
Le 7 mai, le SNEP a exclu « une reprise sans conditions tout en laissant ouvert le principe d’une reprise sous conditions sanitaires, particulièrement pour nombre de jeunes pour qui la reprise scolaire pourrait être une bouée de sauvetage. »
Aussi a-t-il conscience que les questions sanitaires ne sont pas exclusives et que se posent également des questions politiques et des questions institutionnelles autour de la définition des contenus.
- Côté politique, sous couvert de bonnes intentions, un mouvement de députés LREM a fait des propositions reprises par Blanquer avec le dispositif 2S2C. Ce projet tend à faire disparaître l’EPS de l’école et l’offrir aux clubs et au mouvement sportif plutôt qu’à chercher à la financer directement.
D’une part, les modèles anglais et allemand devraient nous alerter sur les dérives de tels choix. Et contrairement à ce qu’il croit, le mouvement sportif n’a rien à gagner à la destruction du service public d’éducation.
- Côté institutionnel, depuis plusieurs années, il y a un conflit entre la profession et l’institution parce que celle-ci oppose l’apprentissage de savoirs dans les APSA et des apprentissages qui assureraient la continuité entre l’EPS et l’activité physique en dehors de l’école.
L’institution présuppose que transformer le prof d’EPS en coach sportif, en entrepreneur du bien-être, permettrait aux élèves d’être plus actifs dans leur vie sociale. Elle oublie non seulement le poids des données sociologiques et le poids de l’éloignement des installations sportives dans la continuité de la pratique, mais aussi que c’est en visant de réelles acquisitions techniques, tactiques, corporelles qu’on donne le goût et l’envie de la pratique sportive et artistique.
L’institution présuppose que transformer le prof d’EPS en coach sportif, en entrepreneur du bien-être, permettrait aux élèves d’être plus actifs dans leur vie sociale.
C’est ainsi que les statistiques montrent une forte corrélation entre le passé sportif et la continuité de l’activité sportive. Nous affirmons donc que l’EPS doit permettre d’acquérir des savoirs dans les APSA pour jouer son rôle d’élément déterminant dans la démocratisation de la pratique des sports et des arts.
Quelle EPS réinventer dans cette période du dé-confinement ?
Nous invitons les collègues à une lecture positive de ce préambule et à faire des propositions, en respectant bien entendu les mesures sanitaires préconisées,
qui permettent aux élèves « une pratique réelle, partagée, ludique sur les espaces extérieurs, une EPS extraordinaire. » pour reprendre les mots de la Degesco.
Contrairement à ce que laisse entendre la Degesco, l’EPS extraordinaire est une EPS qui transforme l’ordinaire en extraordinaire !
On pourrait citer, à titre d’exemples : un temps fort à chaque niveau qui finalise nos cycles d’enseignements, une sortie en dehors de l’établissement qui permet de réinvestir les savoirs appris à l’école, un spectacle, des stages pour organiser des apprentissages « massés » (natation, APPN..)…
Nous avons déjà reçu des propositions de collègues qui ont pensé cette EPS à vivre :
- Une EPS qui explore la nature par des randonnées, de la course d’orientation ou qui invite à découvrir l’environnement urbain ou rural.
- Une EPS qui propose aux élèves dans l’établissement des parcours de disque golf.
- Une EPS qui propose de créer des numéros de cirque en s’appuyant sur le jonglage.
- Une EPS qui permet de créer et de s’exprimer avec et pour les autres en danse.
Quelle EPS réinventer pour « l’après covid » ?
Gageons qu’à l’avenir, et dès septembre, tout en s’inscrivant dans le contexte sanitaire du moment et de la situation particulière de leur établissement, les enseignants d’EPS s’investiront pour construire
et réinventer cette EPS ambitieuse dont auront plus que jamais besoin les jeunes et les adolescents, qu’ils et elles plongeront dans cette volonté de faire vivre au quotidien ces moments extraordinaires que permet notre discipline.
Le jour d’après sera-t-il enfin celui où le ministère de l’Education Nationale prendra conscience de ce qui se fait réellement en EPS pour l’inscrire dans nos programmes ?
Nouvel espace Éducation sur le site du SNEP-FSU
Cette période nous montre que les enseignants ont besoin encore plus de partager et d’échanger avec la profession sur toutes les conceptions pédagogiques qui sont en train de fleurir, capitaliser et diffuser les propositions prometteuses.
Le SNEP-FSU s’est fortement investi pour accélérer la sortie de son nouvel espace éducatif sur son site pour partager ses analyses, organiser la résistance pédagogique pour l’EPS de demain.
Ne nous laissons pas charmer par les sirènes de l’urgence et par les vendeurs d’une conversion des corps.