Home > Dossiers > EPS à l’école primaire : former des enseignant-es ressources Contribution de Michel Nouaille, formateur à l’ESPE de Versailles

EPS à l’école primaire : former des enseignant-es ressources Contribution de Michel Nouaille, formateur à l’ESPE de Versailles

Formation enseignant(e)s EPS
Print Friendly, PDF & Email

Contribution de Michel Nouaille

Les élèves du primaire n’ont pas en quantité et qualité l’enseignement de l’EPS répondant à leurs besoins. Comment trouver des solutions avec les principales ressources de l’école, à avoir les enseignantes et les enseignants eux-mêmes ?

Ce constat redondant depuis des décennies nous demande donc de questionner  l’organisation de cet enseignement obligatoire.

Proposer une EPS répondant aux besoins des élèves est difficile, demande la maîtrise de très nombreuses compétences professionnelles, voire même la construction d’un véritable « habitus professionnel » spécifique impliquant le rapport de l’enseignant-e à son propre corps, à l’activité physique, à l’effort, à la prise de risque et au vaste domaine des APSA, activités de référence des situations d’enseignement-apprentissage.

Proposer une EPS répondant aux besoins des élèves est difficile, demande la maîtrise de très nombreuses compétences professionnelles, voire même la construction d’un véritable « habitus professionnel » spécifique impliquant le rapport de l’enseignant-e à son propre corps, à l’activité physique, à l’effort, à la prise de risque et au vaste domaine des APSA, activités de référence des situations d’enseignement-apprentissage.

De même qu’est posé pour d’autres champs disciplinaires le rapport de l’enseignant-e à la culture scientifique, au domaine de la langue orale, écrite, à la culture littéraire, à la culture artistique.

Enseigner l’EPS demande d’intervenir dans des milieux très variés (dans des gymnases, dans des équipements spécialisés, en extérieur dans la cour de récréation, sur un plateau, un stade…) dont la maîtrise n’est pas aisée.

Enseigner l’EPS demande une structuration importante et rapide de l’espace d’activité des élèves, rarement adapté à priori aux ressources des élèves de 2 à 11 ans, la maîtrise de situations pédagogiques très ouvertes, évolutives, pouvant être perçues par des  regards  naïfs  comme  relevant du… désordre ou d’une prise de risque inconsidérée.

Tous les enseignants-es peuvent-ils se construire cet habitus et le garder jusqu’à …62 ans et peut  être plus ?

Je n’aborderai pas ici les questions relevant de la nécessaire amélioration formation initiale.

Comment alors faire bouger les choses ?

L’histoire des dernières décennies nous montre qu’il serait vain et dangereux de croire que la solution pourrait être trouvée hors de l’école.

Non, c’est dans l’école, et avec les enseignant-es du 1er degré qu’il nous faut trouver les solutions,  en nous adossant aussi sur les évolutions institutionnelles (projet d’école) à condition qu’elles ne remettent pas en cause le service public d’éducation et puissent s’appuyer sur les principales ressources à savoir les professeurs d’école eux-mêmes.

Une expérience vécue en formation continuée pendant quelques années à la fin des années 1980 dans le département de l’Essonne (mais rapidement interrompue par l’institution, malgré, ou plutôt à cause des effets produits) mérite, je pense, d’être revisitée.

Pendant quelques années, des professeurs d’école titulaires reconnus pour leur investissement professionnel en EPS par l’institution, étaient  mandatés par les collègues de leur école  pour un  stage de formation continuée de 5 semaines portant sur « l’enseignement de l’EPS ».  Ce  stage assuré par l’équipe départementale d’EPS (Profs EPS de l’EN, CPC et CPD) permettait aux stagiaires de devenir à l’issue de cette formation « maître ressource » et « maître de secteur » dans cette discipline. Le même projet concernait aussi les arts visuels et la musique.

A charge pour ces collègues dans le cadre de leur service statutaire d’impulser en relation avec leur CPC toutes les initiatives possibles pour dynamiser l’enseignement de l’EPS dans leur école : contribution de l’EPS au projet d’école, programmation annuelle, de cycle, d’école  de l’EPS,  aide à  sa mise en œuvre à travers si nécessaire des échanges de service, participation aux activités de l’USEP pour finaliser les apprentissages,

coopération avec le CPC d’EPS pour l’organisation de rencontres inter écoles, relations avec les partenaires (service municipal des sports, gardiens de gymnase, professeurs d’EPS du collège de référence,…), achats et maintenance des équipements et matériels….les tâches ne manquent pas mais demandent de réelles compétences et de beaucoup de détermination pour être menées à bien !

Dés la rentrée de septembre suivante, cette action de formation continuée a eu des effets concrets sur les écoles et les circonscriptions concernées. Progressivement des moyens spécifiques nouveaux ont été attribués par l’institution pour rémunérer des tâches nouvelles reconnues comme légitimes et nécessaires au développement de l’EPS (demi-journées de décharges, indemnités).

Les premiers obstacles sont venus de l’inspection académique qui a pointé le risque de l’émergence de postes à profils (alors qu’il en existe dans certaines disciplines), qui a vu augmenter les demandes en moyens et qui n’a sans doute pas apprécié de voir des enseignants, des écoles prendre trop d’initiatives hors de ses propres prescriptions.

Que retenir de cette expérience ?

Les ressources existent dans les écoles pour dynamiser l’EPS du 1er degré, à condition que  l’institution sache les identifier, les organiser, les valoriser. La contribution des CPD et CPC, engagés sur le terrain, au plus près des réalités de l’EPS dans les écoles, les circonscriptions, le département, la cohésion de l’équipe départementale EPS à travers la conception et mise en œuvre des stages de formation continuée, est une condition de l’évolution des pratiques.

Les ressources existent dans les écoles pour dynamiser l’EPS du 1er degré, à condition que  l’institution sache les identifier, les organiser, les valoriser.

Après quelques années d’expérience professionnelle de la polyvalence, une formation continuée conséquente sur la base d’une dominante et d’une fonction (maître ressource, maître de secteur), peut être un levier particulièrement efficace pour approfondir la maîtrise de l’enseignement des disciplines, peut permettre l’affirmation d’une identité professionnelle de chacun-e au service de l’enrichissement du projet d’école et ce au profit de la quantité et la qualité de l’EPS enseignée.

Ce projet limité à 2 ou 3 ans me semble néanmoins toujours pertinent et ce également  pour  d’autres disciplines (EPS, arts visuels, musique, technologie…).

Malgré le coup d’arrêt porté par l’Inspection académique à cette dynamique, de nombreux stagiaires sont restés des militant-e-s de l’EPS, particulièrement investis au sein des projets de leur circonscription et l’USEP et plusieurs sont devenu-e-s à leur tour CPC d’EPS.