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Renforcer l’enseignement de l’EPS dans le primaire ?

Ce texte est un extrait du document d’analyse du SNEP-FSU «La Cour des comptes et l’EPS, un rapport utile ?» paru en septembre 2019

Les préconisations du rapport de la Cour des comptes pour l’école primaire

  1. (n°Cc3)/ Contrôler l’effectivité des trois heures d’enseignement obligatoire en primaire et veiller à leur respect.
  2. (n°Cc4)/ Rendre règlementairement possible l’intervention de professeurs d’EPS au profit du primaire dans le 3ème cycle du socle commun de connaissances et de compétences.
  3. (n°Cc1)/ Veiller à ce que les activités de l’USEP et celles des intervenants extérieurs (PVP et ETAPS) augmentent effectivement l’offre d’instruction.

Si le rapport de la Cour des comptes s’intéresse à l’EPS en général, il y a une partie entière sur l’école primaire, ainsi qu’à l’USEP. On pourrait se réjouir ! Cependant, si elle fait des constats que l’on peut partager (même si elle a tendance à noircir le tableau), elle a surtout cherché à trouver des solutions peu coûteuses, pour assurer le lien entre l’école et le mouvement sportif, dans la perspective des JOP de 2024. Elle n’a pas cherché à analyser finement les causes de la situation, d’où un grand nombre de solutions peu opérationnelles, voire incantatoires.

Le rapport de la Cour des comptes cherche surtout à trouver des solutions peu coûteuses, pour assurer le lien entre l’école et le mouvement sportif, dans la perspective des JOP de 2024

Les horaires d’EPS non assurés

Les horaires officiels de 3h par semaine ne sont pas respectés. C’est vrai, mais la Cour des comptes annonce 1h30 par semaine « selon le ministère », alors que la dernière étude ministérielle qui date de 2014 actait « un peu moins de 2h par semaine » (rapport IGIGAEN 2013). Pour assurer les 3h, la Cour des comptes recommande de : « Contrôler l’effectivité des trois heures d’enseignement obligatoire en primaire et veiller à leur respect (MEN) »

Certes, on peut demander aux Inspecteurs d’aiguiser leur vigilance, mais le contrôle ne suffira pas ! Le faible horaire est la résultante de la diminution globale du temps scolaire et de causes multifactorielles. D’une part, elle ne concerne pas que l’EPS. En effet, l’ensemble des disciplines autres que maths et français ne représentent que 20,5% du temps scolaire réel (étude de 2015, thèse d’Aline Blanchouin), 63,8% pour les maths et le français. Il reste 15,7% pour un temps « a-disciplinaire », qui n’est jamais pris en compte dans les programmes. Cela ne peut pas s’arranger lorsque le ministre lui-même insiste sur les fondamentaux qui ne sont pour lui que français et maths ! D’autre part, s’ajoute des problèmes d’absences d’équipements (ou équipements éloignés) qui limitent le temps d’EPS, ainsi que l’absence de formation continue et de soutien institutionnel.

Pour finir sur les horaires, les précédentes enquêtes montrent qu’il est difficile de parler en « moyenne ». Dans certaines écoles, l’EPS est le parent pauvre, dans d’autres, elle est dynamique et les 3h sont assurées. Il est intéressant de voir quelles conditions sont réunies par les équipes pour assurer les horaires officiels.

La formation initiale et continue

La formation initiale

La Cour des comptes annonce 20h de formation initiale pour les PE. Là aussi elle noircit un peu le tableau. Cet horaire concerne les étudiant.es qui ne bénéficient que d’une année de formation avec un mi-temps dans une classe (environ 50%). L’autre moitié bénéficie de 50 à 100h de formation sur les deux années de master dans un contexte où les horaires globaux de formation diminuent. Tant que les étudiant.es seront à mi-temps en master 2, il sera difficile de faire mieux. La Cour des comptes pointe le fait que les ateliers de pratique ont quasiment disparu en formation. C’est vrai et c’est directement lié à la suppression de l’épreuve physique au CRPE. La formation continue

Elle est bizarrement absente du rapport. La Cour des comptes semble ignorer que depuis plusieurs années, la quasi-totalité des stages de formation continue ont disparu. Elle semble également ignorer, que la loi (Code de l’Éducation, article L 312–3) stipule que les professeur.es des écoles peuvent recevoir une formation « à dominante » en EPS et que celles-ci seraient un bon levier pour développer l’EPS dans les écoles.

L’encadrement et le soutien aux enseignant-es

Les équipes départementales : CPD et CPC EPS

Il est très étonnant de constater que le rapport de 90 pages consacre seulement 10 lignes aux CPD alors qu’il consacre 2 pages entières aux ETAPS et aux PVP. On aurait souhaité que la Cour des comptes lise l’enquête sur les missions des CPD publiée par le SNEP-FSU et le SNUipp-FSU en mars 2019. Elle montre une énorme disparité entre départements concernant les dotations et les missions des CPD, avec de moins en moins de possibilités d’accompagnement en EPS et de plus en plus de tâches administratives ou généralistes. Sans compter la disparition récente de l’obligation d’un CPC spécialiste EPS dans chaque circonscription. La Cour des comptes aurait pu trouver des solutions autres que simplement « renforcer les modalités de suivi de leurs activités [des CPD] par les DASEN »!

On aurait souhaité également que la Cour des comptes s’inspire de la note de service publiée au BO n°3 du 19/01/84, EPS à l’école maternelle et élémentaire Premières recommandations. Cette note affirmait l’importance à accorder à l’enseignement de l’EPS et spécifiait le rôle des conseillers pédagogiques et des équipes départementales. Aucune circulaire de ce type n’a été publiée depuis plus de 30 ans ! Ce serait bienvenu et permettrait d’accorder les paroles et les actes.

Des professeur.es d’EPS dans le primaire

La Cour des comptes propose l’intervention de professeur.es EPS dans les écoles primaires. Cela existe déjà, de manière réglementaire dans le cadre du cycle 3, mais en l’absence de moyens, cela ne peut être productif, sauf à déshabiller Paul pour habiller Pierre.

Un ou une enseignante personne-ressource EPS dans chaque école

Il est fort dommage que la Cour des comptes n’ait pas exploré cette piste, qui existe déjà de manière informelle dans nombre d’écoles. Des professeur.es des écoles volontaires (ayant suivi ou non des études Staps) assurent la dynamique de l’équipe en l’EPS (cointervention, échanges de service, aide en termes de matériel).

Ces professeur.es d’école ressources pourraient bénéficier en priorité d’une formation « à dominante », bénéficier d’heures pour animer le sport scolaire. Des formations de ce type ont déjà existé, sans jamais être évaluées par l’Éducation Nationale (Précisons que cette formation à dominante n’implique pas des postes « à profil »).

Les Intervenant.es extérieurs

La Cour des comptes constate que la présence des intervenant.es extérieurs n’accroit pas l’offre d’EPS en termes horaires (p.51) et propose de les réserver au sport scolaire et au péri-scolaire. Concernant les PVP (Paris), elle est explicite : cela « revient à faire supporter deux fois la même dépense par les fonds publics pour une même mission ». (p.50). Pour affiner son analyse, la Cour des comptes aurait gagné à se référer à une enquête récente (ses chiffres sont une projection de 1997) pour affiner son analyse et bien différencier les différents types d’intervenants (MNS, intervenants pour les APS à encadrement renforcé, ETAPS, bénévoles).

Le sport scolaire, l’USEP

La Cour des comptes souhaite un rapprochement entre l’USEP et UNSS au nom de la lisibilité. Elle déplore la faiblesse de l’USEP en soulevant la question du bénévolat, mais sans y apporter de solutions ! Si le but est de dynamiser le sport scolaire, pourquoi ne pas accorder une décharge d’heures aux enseignant-es volontaires, au moins un.e par école, comme pour l’UNSS ?

Si le but est de dynamiser le sport scolaire, pourquoi ne pas accorder une décharge d’heures aux enseignant-es volontaires, au moins un.e par école, comme pour l’UNSS ?

Le SNEP-FSU et SNUipp-FSU portent pour l’EPS et le sport scolaire (lettre commune au MEN, juin 2019) un projet de développement :

La formation initiale : la réforme à venir doit conforter la place de l’EPS dans la formation et non la dégrader. Une épreuve obligatoire au CRPE doit être conservée et les horaires renforcés.

La formation continue : est un levier déterminant. Il est incompréhensible que la circulaire de rentrée 2019 qui ne cite jamais l’EPS, ni dans les savoirs fondamentaux, ni dans le chapitre

« cultiver le plaisir d’être ensemble » dont les objectifs relèvent du programme de l’EPS (respect d’autrui, inclusion/handicap, dimension culturelle des apprentissages) !

La nécessité d’équipements pour l’EPS au quotidien, avec un guide pour l’école primaire comme il en existe un pour le second degré.

Des équipes départementales EPS confortées : avec la nécessité d’un.e conseiller.e pédagogique de circonscription (CPC) spécialisé.e en EPS par circonscription et des CPD en nombre suffisant.

Un soutien à l’USEP : avec notamment des moyens humains et une décharge horaire pour les professeur.es d’école animateurs de l’USEP.

Tendre vers une personne-ressource par école (enseignant.e recevant une formation supplémentaire comme le prévoit la loi) pour dynamiser l’EPS et le sport scolaire dans chaque équipe d’école.

Les partenariats : ceux-ci ne doivent pas se traduire par des substitutions aux enseignant.es et être limités.

Le dispositif « Génération 2024 » doit permettre d’impulser des projets, dans le respect des rôles de chacun.e et sous la maîtrise des enseignant.es, et avec de réelles aides du ministère… pas seulement des Volontaires du Service civique et des partenariats avec le privé.

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