Nous l’avons dit, les inégalités sont nombreuses et particulièrement importantes dans notre pays. Elles n’épargnent pas l’EPS. Les travaux réalisés à ce sujet depuis maintenant quarante ans nous éclairent sur leur nature. Trois critères permettant de caractériser ces inégalités méritent une attention particulière : l’appartenance de sexe, l’origine sociale, l’âge. Pour aller vite, disons que les filles des milieux défavorisés (celles de LP ou de CFA) ont moins de chance de faire du sport ou de pratiquer une activité physique en vieillissant (notamment à partir du moment où elles ne sont plus scolarisées).
A partir des années 1980, les travaux d ‘Annick Davisse et Michel Volondat ou, plus tard, ceux de Cécile Vigneron ont permis de mieux comprendre certaines causes des inégalités en EPS. Les résultats au baccalauréat montraient par exemple que les garçons obtenaient environ deux points de plus que les filles en EPS. Ces données étaient mises en corrélation avec un autre constat qui venait en partie expliquer ce phénomène. Les programmations étaient dominées par les pratiques visant la performance ou valorisant l’opposition (athlétisme et sports collectifs notamment). Le postulat était que, privilégiées de façon massive en EPS, ces activités participant précocement à la construction de l’identité masculine au cours de la socialisation juvénile extra scolaire profitent logiquement aux garçons. C’est à partir de là que la notion de « curriculum masculiniste » est employée notamment par Geneviève Cogérino. Cette réalité est venue questionner la discipline qui a dès lors impulsé une politique cherchant à résorber les inégalités. Des stratégies ont donc été mises en œuvre pour favoriser la réussite des filles :
- Développer les activités artistiques (danse et cirque notamment).
- Rééquilibrer les programmations grâce au regroupement des sports collectifs, des sports de raquette et des sports de combat sous l’appellation activité d’opposition et de coopération.
- Créer un groupe d’activité dit d’entretien et de développement (musculation, step …).
88 % des titulaires d’un diplôme supérieur à bac + 5 ont eu une activité sportive, contre 39 % de ceux qui ne disposent pas de diplôme
Avec le recul, on constate que modifier les programmations ne suffit pas.
Lorsqu’on observe les derniers textes officiels, force est de constater qu’en se structurant de manière discriminatoire, le système éducatif français semble entériner les inégalités plus qu’il ne semble pouvoir les combattre. En LGT, une liste nationale d’APSA existe et l’accent est mis sur l’engagement dans un processus de création artistique dès la seconde. En LP, la liste nationale disparaît au profit d’une adaptation du projet au contexte local. Contrairement aux exigences des LGT, il s’agit là de programmer au minimum deux séquences s’appuyant sur des pratiques du champ d’apprentissage n°5 (musculation, step etc.).
Une question pour conclure : sans de profonds changements concernant la structure du système d’enseignement, ou la formation continue des enseignant.es, qui seraient des élément révélateurs de véritables transformations sociales, qu’est-il possible d’attendre en termes de résorption des inégalités ?
Je tiens à remercier Eric Donate pour son travail sur cette thématique qui a largement contribué à alimenter cette réflexion.
Quelques références (merci à Claire Pontais) :
- Existe un sport féminin ? Cécile Ottogalli ?
- Soulever 10 tonnes Cécile Vigneron
- Faut-il apprendre aux filles à s’opposer ? Annick Davisse
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