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Épreuve EPS au CRPE niveau Licence 3 : réactions du SNEP et du SNUipp (FSU)

Réaction et demandes du SNEP-FSU et de la FSU-SNUipp concernant le texte ministériel : « Rappels réglementaires sur l’épreuve EPS et consignes de mise en forme des sujets ». Nos syndicats contestent l’épreuve telle qu’elle est envisagée et formulent des demandes pour qu’elle soit révisée en profondeur. Ils demandent également des concertations impliquant tous les acteurs et actrices au plan académique. 

À l’attention de :
Madame Caroline PASCAL, Directrice Générale de l’Enseignement Scolaire (DGESCO)
Monsieur Olivier SIDOKPOHOU, Responsable du collège Expertise disciplinaire et pédagogique (IGÉSR)
Madame Carole SÈVE, Doyenne de l’IGÉSR EPS

Paris, le 23 octobre 2025

Objet : « Réaction au texte ministériel : « Rappels réglementaires sur l’épreuve EPS et consignes de mise en forme des sujets »

Madame la Directrice Générale, Monsieur le Responsable, Madame la Doyenne,

Nous avons pris connaissance du document du ministère intitulé : « Rappels réglementaires sur l’épreuve EPS et consignes de mise en forme des sujets ».

Ce document s’inscrit dans une réforme que nous contestons, parce que structurellement problématique. Les épreuves du concours en sont une des conséquences concrètes qui risquent d’impacter fortement la formation. Le document sur les épreuves n’a fait l’objet d’aucune concertation. Nous soulevons ici les principaux problèmes.

La confusion des termes :

Le texte, tout en renvoyant les candidat·es aux programmes actuellement en vigueur, réinvente des dénominations et ajoute de la confusion en utilisant le terme « domaines » pour deux choses différentes (les trois « cultures » et les domaines d’APSA) tandis que les domaines du socle ne sont pas évoqués.

  • Le classement des sujets en trois domaines de connaissances : « la culture sportive, la culture corporelle et la culture citoyenne » interrogent d’emblée sur le plan théorique.

L’épreuve permet d’apprécier les connaissances dans le champ des APSA, supports de l’enseignement de l’EPS à l’école et au collège, et sur le développement moteur et psychologique des enfants. Cette épreuve mobilise également les capacités de réflexion et d’analyse du candidat. Ces connaissances relèvent de trois domaines : la culture sportive (les techniques, les tactiques, les règlements, les sciences et technologies appliquées à la pratique des activités physiques, sportives et artistiques), la culture corporelle (les effets de la pratique physique sur son état de bien-être et de santé, les indicateurs de l’effort, la sécurité) et la culture citoyenne (la coopération et le respect des règles collectives dans la pratique des activités physiques sportives et artistiques). Le jury propose deux questions relevant de domaines différents, le candidat choisit d’en traiter une seule. Chaque question porte sur l’un des trois domaines de connaissances (culture sportive, culture corporelle, ou culture citoyenne).

Ces 3 « domaines », non seulement, laissent penser que la culture sportive ne serait ni corporelle ni citoyenne et inversement (!), mais le découpage risque d’empêcher toute approche didactique, qui justement chercherait à relier les trois aspects : connaissances des APSA, problèmes que cela pose aux élèves et à la façon dont ils se les approprient à l’école. Ceci est confirmé par les sujets proposés qui sont caricaturaux : les sujets d’athlétisme illustrent la culture technique, ceux de danse la culture corporelle et les sports collectifs la culture citoyenne. Quid d’un sujet de danse dans la culture sportive ? Impossible puisque la danse relève de l’artistique alors qu’il y a bien des apprentissages techniques en danse ! Quid des apprentissages technico-tactiques pour progresser en sports collectifs, relèvent-ils de la culture citoyenne ou de la culture sportive ?

Dans le texte, les sujets sur la sécurité relèvent à un endroit de la culture corporelle (introduction) et à un autre de la culture citoyenne (exemple APPN). Ce n’est pas sérieux. Ces 3 cultures n’ont aucun fondement théorique, voire nient toutes les théories sur la culture sportive. Ils doivent être abandonnés.

Si ce découpage correspond aux enjeux de l’EPS, il est impératif de reprendre les termes des programmes, d’éviter du jargon professionnel, et d’utiliser des expressions établies institutionnellement et/ou professionnellement.

Si le découpage en trois catégories correspond à une volonté de classer les sujets, a minima, il faut les présenter en termes de « dominante » n’excluant pas les deux autres, et avec un autre vocabulaire :

  • Connaissances des APSA (premier niveau de didactique) ;
  • Connaissances des élèves (hypothèses sur le comportement des élèves) ;
  • Connaissances pédagogiques (minimales à un niveau L3).

Mais ce découpage est-il vraiment nécessaire, quand on nous dit que « le questionnement peut être élargi aux deux autres domaines non traités dans la question initiale« , ce qui sera incontournable ! Comment justifier des enjeux de l’athlétisme et de trois acquisitions dans une course athlétique (culture sportive ?), sans parler des problèmes des pratiquant·es (culture corporelle ?) et sans évoquer quelques pistes d’apprentissages au sein d’un groupe (culture citoyenne ?).

  • Les domaines d’APSA dont la liste ne sera connue qu’au moment de l’admissibilité.
  • La référence à des « domaines d’APSA » qui ne sont pas un concept établi (liée aux « domaines d’action »?) ou faisant référence dans les cadres institutionnels de l’EPS, puisque cette expression est absente des programmes et des projets du programme 2026.
  • La liste d’APSA : d’après le document, celle-ci ne sera connue qu’au moment de l’admissibilité. Autant dire qu’il n’y a aucun programme et que les étudiant·es jouent au poker ! Depuis la création des IUFM, c’est le choix inverse qui avait été fait, avec un programme limité à 4 APSA (natation, athlétisme, sports collectifs, danse) qui était jugé largement suffisant. Que les candidat·es aient une licence PE ou une autre licence, leurs connaissances seront d’autant plus pertinentes qu’elles seront approfondies. Limiter le nombre d’APSA est impératif pour éviter un zapping totalement inopérant en termes de formation. Cette liste d’APSA doit être précise et exhaustive, arrêtée pour 3 ans (durée de la Licence) et entrer dans le cadre du module de 60 h dans les autres licences.
  • La référence au cycle 4 :

Le niveau de connaissances exigibles correspond aux attendus de programmes de l’enseignement commun en EPS pour le cycle 4.

Cette référence est le repère pour toutes les disciplines, en termes de connaissances pour les candidat·es. Cependant, il interroge fortement pour l’EPS qui, au cycle 4, est uniquement une pratique, alors que l’on attend des candidat.es des connaissances théoriques (sauf à remettre une épreuve pratique dans le concours). Au regard des sujets proposés, celles-ci sont – fort heureusement – supérieures à celles d’un·e collégien·ne. D’autre part, cette référence au cycle 4 semble avoir une incidence sur les sujets proposés (référence aux APPN, absence du « savoir nager », aucune référence aux cycles 1, 2 et 3, interrogation sur le développement de l’élève et non du développement de l’enfant comme dans les textes actuels). A minima, cette référence au cycle 4 doit être explicitée pour éviter les malentendus pour les formateur·rices, les jurys et les candidat·es.

  • Le temps de préparation :

Durée de l’épreuve : 20 minutes, dont huit minutes d’exposé, suivi d’un entretien avec le jury.

Ce temps très limité est contradictoire avec l’introduction qui dit que « cette épreuve mobilise également les capacités d’analyse et de réflexion du candidat ». Avec 10 min de préparation, l’étudiant·e sera en crise de temps et l’entretien sera une discussion de lieux communs ou un discours préformaté. La possibilité de parler de la pratique personnelle du·de la candidat·e est en soi intéressante, mais à condition qu’elle puisse être développée, ce qui ne sera pas le cas dans le temps imparti. Par conséquent, un·e candidat·e, qui pourtant a une bonne capacité d’analyse, y compris sur son expérience personnelle, ne pourra pas mobiliser ses compétences.

Les exemples de sujets donnés sont très hétérogènes : cela va des connaissances techniques dans les APSA à des connaissances sécuritaires dans une APPN au choix, jusqu’à des sujets sur le rôle et la fonction des règles dans un sport CO, et ses conséquences sur l’auto-arbitrage. Des sujets sont très ciblés (citer trois techniques en course) et appelleront obligatoirement un développement dans les autres « domaines », d’autres pourraient mettre le jury en difficulté (sécurité dans une APPN), et d’autres encore pourraient être des sujets de thèse (règles et auto-arbitrage). On reconnaît à cette occasion la volonté de cibler un minimum de connaissances dans les APSA, toutefois, à la lecture de l’ensemble, nous faisons l’hypothèse que l’épreuve n’a pas été conçue comme une épreuve de concours exigeante, résultat d’une préparation sérieuse. Le fait que les étudiant·es ne soient qu’en L3 et qu’une grande partie n’aura pas suivi une licence PE justifie que le texte précise que le jury ne doit pas exiger de connaissances professionnelles, mais cette phrase est contradictoire avec la plupart des sujets proposés qui exigent un premier niveau d’analyse didactique (par ex.: expliquer les difficultés qu’un débutant peut rencontrer, identifier trois règles pour permettre le bon déroulement d’un jeu). Le niveau de formation en L3 ne doit pas empêcher de proposer des sujets qui « obligent « les candidat·es à réfléchir aux enjeux génériques de l’EPS et aux enjeux spécifiques relatifs à la logique interne des APSA étudiées, c’est-à-dire un premier niveau de didactique, avec quelques hypothèses sur les comportements des élèves et l’évocation de solutions pédagogiques. Pour ne pas fermer les réponses, il faudrait préciser que le ou la candidat·e doit pouvoir choisir un exemple dans le cycle de son choix. Cela nous semble un minimum pour un recrutement de fonctionnaire de catégorie A.

Les jurys, la consultation des INSPÉ : les collègues des INSPÉ constatent que dans de nombreuses académies, les rectorats préparent le concours sans aucune concertation avec les INSPÉ. Or, les formateurs et formatrices sont les maîtres d’œuvre de la formation et rien ne peut se faire sans leurs compétences. Il est impossible qu’ils ne soient pas consultés pour une telle réforme. Nous demandons que dans chaque rectorat, une concertation ait lieu pour discuter de tous les sujets, y compris la composition des jurys.

Résumé de nos demandes :

  • L’utilisation d’une terminologie en phase avec les programmes actuellement en vigueur ;
  • Une conception de l’épreuve qui permet réellement de mobiliser les capacités de réflexion et d’analyse du·de la candidat·e, comme le stipule le texte ;
  • Suppression du classement en 3 domaines de cultures, infondé théoriquement ;
  • Limitation du programme à 4 APSA, dont la natation. Un programme arrêté pour 3 ans ;
  • Explicitation de la référence au cycle 4 ;
  • Conception des sujets permettant de vérifier des connaissances et réflexions sur les enjeux génériques de l’EPS et sur les enjeux spécifiques relatifs à la logique interne des APSA étudiées (premier niveau de didactique) ; des sujets laissant la place à l’exploitation de l’expérience personnelle du ou de la candidat·e ;
  • Un temps de préparation de 30 minutes (au lieu de 10 minutes) ;
  • Une concertation académique avec les formateurs et formatrices des INSPÉ.

Nous vous prions, Mesdames, Monsieur, de croire en notre profond attachement au service public d’éducation.

Coralie BÉNECH, Co-Secrétaire Générale du SNEP-FSU 

Aurélie GAGNIER, Co-Secrétaire Générale de la FSU-SNUipp